Nous reviendrons sur les vampires plus tard. Maintenant, je vais te parler un peu plus de moi, et du jour où on a commencé à se moquer de moi à l’école.
Quand on attend le réchauffement climatique avec impatience
Je suis née dans un pays glacé.
Les vampires ayant déjà une température corporelle plus basse que la normale, j’ai toujours eu toutes les misères du monde à me réchauffer, et le corps et le coeur. Une vie en hypothermie.
J’ai toujours envié les vampires qui naissent dans un pays chaud. Les choses ne sont pas faciles pour eux non plus, mais de manière générale, ils s’en sortent quand même mieux que nous, petits vampires polaires.
Quand tu as une température corporelle basse, en hiver, tu grelottes sans cesse. Tu passes ton temps à t’emmitoufler dans des couches et des couches de vêtements chauds, mais malgré ça, tu continues de trembler, et pour couronner le tout, tu as de la difficulté à parler parce que tes dents n’arrêtent pas de claquer.
Je peux te dire que quand tu rentres à l’école la toute première fois de ta vie, et que comme par hasard ce jour de septembre là, le mercure a décidé de descendre à 5 degrés, tout le monde se moque de toi.
C’est ce qui m’est arrivé, et je me souviens de la seule pensée qui ait traversé mon esprit de petite fille à l’époque : « Ça commence vraiment très, très mal. »
Premier jour d’école, premières moqueries
Dans la cour, tandis que des enfants se moquaient de moi parce que j’avais l’air d’un bonhomme Michelin, d’autres venaient me demander comment je m’appelais, et je n’arrivais à répondre que : « Gla gla gla. » Grooos succès.
Tu ne peux qu’imaginer ce qui s’est passé quand, une fois à l’intérieur j’ai dû retirer toutes mes couches, et que je suis apparue dans toute ma splendeur pour la première fois.
En voyant mes yeux rouges, mes grandes oreilles, ma peau blanche, mes crocs et mes longs cheveux noirs, les gamins ont tous commencé à hurler d’effroi et à courir dans tous les sens.
En plus, à l’époque, je ne pouvais pas choisir mes vêtements et ma mère m’avait habillée tout en noir, vampire-staïle.
Moi ? J’étais tétanisée.
Très vite, constatant que j’étais encore plus terrorisée qu’eux, ils se sont arrêtés, ils ont fait un cercle autour de moi, m’ont pointée du doigt, et se sont mis à rire.
Et ils ont ri, et ils ont ri, et ils ont ri. On aurait dit une bande de hyènes.
Ils allaient rire et se moquer de moi pendant des siècles, mais ça, je ne le savais pas encore.
Le début de la fin
Dès ce premier jour d’école, on m’a trouvé certains des surnoms qui allaient me suivre toute ma vie : mocheté, monstre, morte-fille, Draculette, méduse, et j’en passe.
Ce jour-là, j’ai observé les premiers groupes de petits copains se former.
Je me souviens que toutes les petites filles blondes s’étaient mises ensemble à la même table octogonale. Les enfants qui portaient des lunettes aussi. Les enfants qui criaient plus que les autres s’étaient aussi tous réunis.
Puis il y avait cette table de gamins sans signes particuliers où il restait une place libre, mais quand j’ai voulu la prendre, ils m’ont dit que j’étais trop laide pour m’asseoir avec eux.
Je me souviens m’être demandé s’ils s’étaient bien regardés.
Quand je suis rentrée à la maison ce soir-là, après un trajet bien silencieux dans la voiture avec ma mère, j’ai dit fermement à mes parents que je ne voulais plus jamais retourner à l’école de toute ma vie, qu’on ne m’y reprendrait plus.
Inutile de te dire qu’on ne m’a pas écoutée.