On pourrait croire que les autres enfants ne m’aimaient pas à cause de mes yeux rouges, de mes grandes oreilles, de mes crocs ou de ma peau trop blanche… et c’était le cas ! Mais il n’y avait pas que ça. Au début, je ne comprenais pas vraiment pourquoi on ne m’aimait pas. Pourquoi se moquait-on de moi ? Se moquer de quelqu’un parce qu’il est né différent des autres… Pour quoi faire ? À croire qu’il faudrait que tout le monde naisse pareil !
On aurait l’air bien malin… si on avait tous la même tête.
Être différent des autres, c’est bien
S’il n’y avait qu’une seule espèce d’oiseaux sur Terre… des pigeons, par exemple… tous gris, tous marchant en secouant la tête, et tous faisant « roucoucoucoucou », est-ce qu’ils ne nous manqueraient pas, les autres oiseaux ? Avec leurs têtes et leurs corps différents ? Avec leurs couleurs différentes ? Et leurs chants différents ?
Moi je pense qu’on s’ennuierait grave.
* « Un monde avec une seule espèce d’oiseaux ? Non. Et que dire d’un monde avec une seule espèce de beauté? »
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Dans mon cas, ce qui rendait tout encore plus compliqué, c’est que je n’étais pas différente des autres uniquement physiquement. J’étais aussi différente dans ma tête. Et dans mon cœur.
Quand on se moque de toi parce que tu es toujours en décalage
D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu l’impression que j’étais décalée par rapport aux autres. Je ne les comprenais pas toujours, comment ils fonctionnaient, ce qu’ils pensaient. Est-ce que c’est pour ça qu’eux non plus ne me comprenaient pas ?
Par exemple, je n’ai jamais compris, quand on arrive dans un endroit où il y a plein de monde qu’on ne connait pas, comment est-il possible que dix minutes plus tard, tout le monde se parle et a l’air de s’amuser ? En général, je suis dans mon coin, et je me demande : « Mais de quoi peuvent-ils bien parler, eux qui ne se connaissaient pas il y a encore dix minutes ? »
Les quelques fois où j’essaie de faire comme eux, j’ai l’impression de ne pas dire ce qu’il faut, ou de ne pas poser les bonnes questions. En tout cas, pas celles auxquelles les autres s’attendent, puisqu’en général, la discussion tourne vite très court, et ils vont parler à quelqu’un d’autre.
À force, j’ai pris l’habitude de m’occuper toute seule. Pour une raison que j’ignore, ça en dérange certains. J’ai souvent entendu des critiques, des jugements, ou des réflexions à cause de ça.
Le truc, c’est qu’il y a toujours des raisons d’être comme on est. Comme tout le monde ne peut pas connaître toutes mes raisons, pourquoi est-ce qu’on ne peut pas juste m’accepter comme je suis, sérieux ? Au lieu de me juger ?
Apprécier la solitude
Et puis, il ne faut pas se tromper. Quelqu’un qui apprécie d’être seul, ça ne veut pas toujours dire qu’il en souffre. La solitude et l’isolement, ce n’est pas la même chose !
Bon. Dans mon cas, c’est vrai que j’ai souvent souffert d’isolement, dans ma vie. Mais ça n’empêche pas que j’apprécie la solitude, quand c’est moi qui la choisis. S’occuper tout seul, ça peut être une bonne chose, aussi ! Pour dessiner, par exemple. Ou pour écrire des histoires ! J’adore écrire des histoires… D’ailleurs, un jour, je serai écrivain.
Parfois, pendant que les autres enfants courent dans tous les sens après un ballon, moi, je pense à une nouvelle histoire à écrire. Ou j’observe les oiseaux. Ou les petites bêtes. On peut apprendre tellement de choses en observant les animaux !
En tout cas, je ne me moque pas des enfants qui vont finir avec des bleus et des pantalons troués, puisque ça les amuse. Alors pourquoi faut-il que certains d’entre eux se moquent de moi parce que j’aime rêvasser ?
Il y a des choses qui se font mieux tout seul, c’est tout. Ça ne veut pas pour autant dire qu’on est bizarre.
C’est celui qui dit qui est… et ça c’est bien vrai
Je me souviens, un jour, je regardais deux fourmis en train de se battre pour une miette de pain. Je te jure, on aurait dit une lutte de titans. Aucune des deux ne voulait lâcher. Je voyais bien que chacune d’entre elles voulait être celle qui rapporterait la plus grosse miette à la fourmilière. Pouvoir se la péter auprès des copines…
Ça me rappelait un livre sur les fourmis… Si tu savais comme c’est dingue, la société dans laquelle elles vivent. Il s’y passe tellement de choses !
Eh bien, ce jour-là, une fille qui s’appelait Sophie est venue me voir et m’a demandé ce que je faisais. Je lui ai répondu que j’observais les fourmis.
Sophie adorait dire aux autres qu’ils étaient bêtes. Elle le faisait tout le temps. Et, bien entendu, c’est ce qu’elle me dit à moi.
– T’es vraiment trop bête.
Ce à quoi je lui répondis :
– Tu veux dire que tu es plus intelligente que moi ?
Après une mûre et sage réflexion d’environ une seconde, elle m’a crié :
– Je suis mille fois plus intelligente que toi !
C’est à ce moment-là, j’ai pensé à ma grand-mère, Paulina. Elle était toujours de bon conseil.
Elle m’avait dit une phrase un jour, qui me semblait tout à fait appropriée dans cette situation. Alors je l’ai répétée à Sophie :
– Celui qui se croit plus intelligent que tout le monde, c’est généralement parce qu’il est plus bête que tout le monde.
Sophie m’a tiré la langue.
– Ah oui… c’est clair que t’as l’air super intelligente comme ça… lui ai-je répondu.
Et Sophie est partie, vexée.
Un petit outil bien pratique
Tu devrais essayer la phrase de ma grand-mère… Elle fonctionne pour à peu près tout !
« Celui qui se croit meilleur que tout le monde dans un domaine, c’est généralement parce qu’il est plus nul que tout le monde dans tout le reste. »
« Celui qui se croit plus beau que tout le monde à l’extérieur, c’est généralement parce qu’il est plus laid que tout le monde à l’intérieur. »
« Celui qui se croit plus intéressant que tout le monde, c’est généralement parce qu’il a moins de choses intéressantes à dire que tout le monde. »
Merci Mamie ! <3